Philoxenos philoxenia

« Xenos » en grec, signifie « étranger », quelqu’un qui n’est pas du pays, et xénophobie, la peur des étrangers, comme le terme « xénophobe », car « phobe », « fovos » en grec, signifie « peur ». Aux antipodes, « xenia » veut dire « accueil » et « philoxene », « accueillant », car « philos » en grec signifie « ami ». « Philoxene », c’est aimer nos visiteurs, car ils aiment savoir qu’ils sont aimés au-delà de leurs frontières, ils recherchent aussi la chaleur de l’amour, en plus de leur destination. Ils sont généreux et cherchent « ta xena », « le lointain » en grec.

— "Xenos" in Greek means "foreigner", someone who is not from the country, and xenophobia, the fear of foreigners, like the term "xenophobe", because "phobe", "fovos" in Greek, means "fear". On the other hand, "xenia" means "welcome" and "philoxene" means "welcoming", because "philos" in Greek means "friend". "Philoxene" means loving our visitors, because they like to know that they are loved beyond their borders, and they are looking for the warmth of love as well as their destination. They are generous and are looking for "ta xena", "the far away" in Greek.

Ce qui existe à l’étranger, ailleurs, dans d’autres pays, procure un espoir à chacun. Il y a bien des années, les bateaux nous éloignaient de nos pays. En regardant les bateaux arriver, nous avions l’espoir qu’ils nous ramènent. Ce sont des paradoxes qui méritent d’être soulevés au moment où l’identité de chacun est parfois cause de ségrégation. Dans l’Antiquité, quand le « xenos » arrivait en ville, tout le monde l’accueillait, lui lavait les pieds, lui donnait à manger, et ce n’est qu’après ce rituel qu’on l’interrogeait sur son identité. Comme les temps ont changé !

  Tora pou pas stin xenitia (live) - Album: Live at Herod Atticus (1984)

Tora pou pas stin xenitia, pouli tha gino tou notia Grigora na s'antamoso Yia na sou fero to stavro pou mou paragiles na vro Dachtilidi na sou doso Isoun kiparissi stin avli agapimeno Pios tha mou harisi to fili pou perimeno St'omorfo akrogiali kartero na mou 'rthis pali San mikro, haroumeno pouli Isoun kiparissi stin avli agapimeno Pios tha mou harisi to fili pou perimeno St'omorfo akrogiali kartero na mou 'rthis pali San mikro, haroumeno pouli Hrisi mou agapi, eche yia, na 'ne mazi sou i panayia Ki otan 'rthi to peristeri Tha 'ho kremasi filachto sto parathyri t' anichto Tin kardia mou san asteri Isoun kiparissi stin avli agapimeno Pios tha mou harisi to fili pou perimeno St'omorfo akrogiali kartero na mou 'rthis pali San mikro, haroumeno pouli Isoun kiparissi stin avli agapimeno Pios tha mou harisi to fili pou perimeno St'omorfo akrogiali kartero na mou 'rthis pali San mikro, haroumeno pouli
(Manos Hadjidakis / Nikos Gatsos)

— What exists abroad, elsewhere, in other countries, gives hope to everyone. Many years ago, ships took us away from our own countries. As we watched the ships arrive, we hoped that they would take us back. These are paradoxes that deserve to be raised at a time when everyone's identity is sometimes the cause of segregation. In ancient times, when 'xenos' arrived in the city, everyone welcomed them, washed their feet and gave them something to eat, and it was only after this ritual that they were questioned about their identity. How times have changed!

Parfois, en regardant les informations, j’ai souvent l’impression qu’on régresse. Les images qui nous sont offertes ne sont pas synonymes de progrès. Je me souviens que lors de ma tournée américaine avec Harry Belafonte, il prenait le risque de me présenter à son public et n’hésitait pas à me faire poser à ses côtés. Une femme blanche à côté d’un homme de couleur, l’image n’était pas concevable à cette époque. J’ai adhéré à ses convictions, qui étaient aussi les miennes ; guidée par mes valeurs de liberté, d’égalité, d’amour pour la musique et pour mon partenaire.
Il n’était pas question de me laisser influencer par des mentalités et des pratiques détestables. À l’époque, les Noirs ont mené un rude combat et ont réussi à faire changer les mentalités. Or, quand je vois l’Europe se laisser gangréner par la montée des extrémismes, de la criminalité et du terrorisme qui conduisent à la perte du respect et de la dignité, je me sens propulsée en arrière avec un goût amer.

— Sometimes, when I watch the news, I often get the impression that we're going backwards. The images we are offered are not synonymous with progress. I remember that when I toured America with Harry Belafonte, he took the risk of introducing me to his audience and didn't hesitate to have me pose next to him. A white woman next to a man of colour was an unthinkable image at the time. I adhered to his convictions, which were also mine; guided by my values of freedom, equality, love for music and for my partner.
There was no question of letting myself be influenced by detestable mentalities and practices. At the time, black people fought hard and succeeded in changing attitudes. Now, when I see Europe allowing itself to be corrupted by the rise of extremism, crime and terrorism, leading to a loss of respect and dignity, I feel I've been thrown backwards with a bitter taste.

Il faut donc apprendre à résister
La résistance doit s’opérer chaque jour, à tout niveau, pour être toujours libre de soi-même et respecter les autres. Il faut savoir résister à énormément de choses : à la facilité, à la mauvaise influence, à l’autorité, à la guerre, à l’agressivité. C’est en résistant que nous devenons tous responsables de notre propre vie et nous sommes responsables de ce que nous recevons. C’est pour cela que notre éducation est importante pour chacun.
Constantin Caramanlis me disait : « Quand tu chantes, tu dessines, tu peins le visage de ton pays. Fais attention. » Quelle responsabilité ! Je me sentais déjà responsable de tout, de mes enfants, de mes parents, de mes amis, des règles, des mots, alors mon pays venait s’y ajouter.

  Geh nicht zu den Soldaten - Album : Farben (1983)

Er war grade sechzehn und fast ein Kind Voll stolz auf sein Vaterland Zwei Brüder von ihm zogen in den Krieg Der seit Jahren kein Ende fand Und eines Tags kam ein letzter Brief Dass sie fielen für ihr Land Da wollte auch er in den Krieg hinaus Doch die Mutter hielt ganz fest seine Hand
Mein Sohn geh nicht zu den Soldaten Du versuchst und verspielst dein Glück Zwei Söhne hab ich schon verloren Und ich weiß du kommst nie zurück Und mit seinem Mädchen verbrachte er Eine Nacht voller Zärtlichkeit Es war, als ob es die letzte wär Und sie war zu allem bereit Und am Morgen da schaute er neben sich Und da sah er, dass sie weint Sie klammerte sich wie ein Kind an ihn Und sie sagte: Wenn du jetzt gehst, ist es vorbei
Mein Mann geh nicht zu den Soldaten Du versuchst und verspielst dein Glück Dann hast du die Liebe verraten Ich hab Angst du kommst nie zurück Doch dann ging er zu den Soldaten Hat geglaubt, es wär seine Pflicht. Er tat, was die anderen taten Und er glaubte, es trifft ihn nicht Er merkte schon bald, dass der Krieg um ihn Keinen Halt macht vor Alt und Jung Das Dunkel der Tage ließ keine Spur Von Mut und Heldentum Er schrieb einen Brief, der sein letzter war Niemand sah ihn jemals mehr An den Sohn, der noch gar nicht geboren war Dass er klüger wird als er
Mein Sohn geh nicht zu den Soldaten Du versuchst und verspielst dein Glück Du wirst deine Zukunft verraten Ich hab Angst du kommst nie mehr zurück Mein Sohn geh nicht zu den Soldaten Ich hab Angst du kommst nie mehr zurück
(Ralph Siegel  / Bernd Meinunger)

—  So we have to learn to resist
Resistance must be practised every day, at every level, so that we can always be free of ourselves and respect others. You have to know how to resist a great many things: the easy way out, bad influences, authority, war and aggression. By resisting, we all become responsible for our own lives and we are responsible for what we receive. That's why our education is important for everyone.
Constantin Caramanlis said to me: "When you sing, you draw, you paint the face of your country. Be careful". What a responsibility! I already felt responsible for everything, for my children, my parents, my friends, the rules, the words, so my country was added to that.

Pendant ma première tournée aux États-Unis, avec Harry Belafonte, le pays était en pleine lutte contre le racisme. Le climat était pesant, à chaque coin de rue. Bien entendu, cette tension se traduisait aussi dans le langage, il fallait résister à tout point de vue. C’est ainsi que Belafonte a un jour haussé le ton sur moi. Il pensait que j’étais embarrassée de qualifier la couleur de peau des musiciens parce que je les appelais « paidia ». En grec, cela signifie « enfants » et c’est un terme communément utilisé pour un groupe de garçons et même de filles.
Harry ne le savait pas et, en m’entendant, il est venu m’interrompre pour me dire : « Ni noirs ni blancs, tu dis guys et colored. » C’était en fait sa manière à lui de résister aux vieilles règles d’esclavage qui étaient en train de changer. Je ne pouvais pas comprendre cette haine, car en Europe et en Grèce, à cette époque, il n’y avait pas de différences raciales.
Faire des photos côte à côte avec Harry était une fierté plus qu’une résistance. Un affront à l’époque pour les bien-pensants, mais qu’importe, j’étais fidèle à mes convictions.

  Couleurs - Album: Qu'il est loin l'amour (1981)

Dors mon enfant, c'est déjà l'heure Ça ne sert à rien que tu pleures Dans tes yeux couleur d'arc-en-ciel Il y a des larmes qui sèchent Couleurs, vous êtes des larmes Couleurs, vous êtes des pleurs Elle est en couleur mon histoire Il était blanc, elle était noire La foule est grise, grise alors Il y aura peut-être un mort Couleurs, vous êtes des larmes Couleurs, vous êtes des pleurs Il lui a donné des cerises Et noire sa main les a prises Et rouge sa bouche a mordu Il y a demain un pendu Couleurs, vous êtes des larmes Couleurs, vous êtes des pleurs Voici des fleurs toutes bien faites De la rose à la violette Le bouquet qu'il lui a offert Était bleu, rouge, jaune et vert Couleurs, vous êtes des larmes Couleurs, vous êtes des pleurs Ils ont couru jusqu'au rivage Ils riaient de tout leur visage Ils se sont baignés dans la mer Il y aura des révolvers Couleurs, vous êtes des larmes Couleurs, vous êtes des pleurs La mer est bleue pour tout le monde Pour les peaux brunes, les peaux blondes Quand l'homme s'y baigne en passant Il y a des gouttes de sang Couleurs, vous êtes des larmes Couleurs, vous êtes des pleurs Ce sang qui coule jusqu'à terre Mon enfant ferme tes paupières Pourvu que tu ne saches rien Ce sang qui coule c'est le mien Couleurs, vous êtes des larmes Couleurs, vous êtes des pleurs Les larmes sont partout pareilles Sèchent tes yeux qui s'ensommeillent Dors mon enfant, ne pleure pas Tu ne sais pas encore pourquoi Couleurs, vous êtes des larmes Couleurs, vous êtes des pleurs Couleurs, vous êtes des pleurs
(Guy Béart)

— During my first tour of the United States, with Harry Belafonte, the country was in the middle of a fight against racism. The climate was heavy, on every street corner. Of course, this tension was also reflected in the language, which had to be resisted from every point of view. That's how Belafonte once raised his voice at me. He thought I was embarrassed to refer to the musicians' skin colour because I called them 'paidia'. In Greek that means 'children' and it's a term commonly used for a group of boys and even girls.
Harry didn't know that, and when he heard me, he interrupted me to say, "Neither black nor white, you say guys and colored." It was his way of resisting the old rules of slavery that were changing. I couldn't understand this hatred, because in Europe and Greece at that time there were no racial differences.
Taking photos side by side with Harry was a source of pride rather than resistance. It was an affront to the self-righteous at the time, but no matter, I was true to my convictions.

  How do you keep the music playing (duo Harry Belafonte)  - Album : Hollywood (1993)

How do you keep the music playing How do you make it last How do keep the song from fading Too fast How do you lose yourself to someone And never lose your way How do you not run out of new things To say And since you know we're always changing How can it be the same And tell me how year after year You're sure your heart will fall apart Each time you hear Her name I know the way I feel for you It's now or never The more I love the more that I'm afraid That in your eyes I may not see forever Forever If we can be the best of lovers Yet be the best of friends If we can try with every day To make it better as it goes With any luck than I suppose The music never ends I know the way I feel for you It's now or never The more I love the more that I'm afraid That in your eyes I may not see forever Forever If we can be the best of lovers Yet be the best of friends If we can try with every day To make it better as it goes With any luck than I suppose The music never ends Never ends Never ends
(Michel Legrand / Alan & Marilyn Bergman)

 


Artwork : Nana Mouskouri / Marc-Antoine Coulon / PhB
© 2013 Nana Mouskouri – Itinéraire intime (Cherche-midi)